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A Toulouse, Moudenc joue la passerelle entre LR et LREM

Jean-Luc Moudenc, élu en 2014 sous l'étiquette LR, est cette fois soutenu par le parti de droite et par la macronie. Une alliance qui arrange autant l'édile qu'Emmanuel Macron.
Le maire sortant de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, à l'Elysée, en novembre 2018. (Marc CHAUMEIL/Photo Marc Chaumeil)
par Stéphane Thépot, correspondant à Toulouse
publié le 28 janvier 2020 à 16h11

On souhaite bien du courage à Etienne Guyot, préfet de la région Occitanie, quand il devra accoler une «nuance» officielle à la liste présentée par Jean-Luc Moudenc, maire sortant (LR) de Toulouse. Cet ancien adjoint de Dominique Baudis et Philippe Douste-Blazy présente en effet la particularité d’être à la fois soutenu par La République en marche (LREM) et Les Républicains ; mais aussi une myriade de 5 autres micropartis, depuis les anciens LR «macronistes» de Franck Riester (Agir) jusqu’aux centristes UDI de Jean-Christophe Lagarde. Sans oublier l’ancien référent local de Nicolas Dupont-Aignan, rebaptisé «divers droite» depuis qu’il a pris ses distances au moment de l’alliance de Debout la France avec Marine Le Pen au second tour de l’élection présidentielle.

«Mon parti, c’est Toulouse»

Avec huit colistiers estampillés LREM, dont trois qui font office de bouche-trou en position non éligibles, les marcheurs toulousains font pâle figure aux côtés des 18 LR qui fournissent le gros des troupes. Jean-Luc Moudenc, lui, ne se compte pas dans le lot. «Mon parti, c'est Toulouse», répète le maire sortant, récusant toute étiquette partisane pour un scrutin local. La nouvelle nuance «divers centre» inventée par le ministère de l'Intérieur semble avoir été taillée sur mesure pour lui.

Tel une anguille, Jean-Luc Moudenc a réussi à se faufiler entre les injonctions contradictoires des états-majors nationaux. Réputé Macron-compatible, cet ancien centriste qui a débuté sa carrière dans les rangs des jeunes du Centre des démocrates sociaux (CDS) de Jean Lecanuet avait apporté son soutien à la liste Bellamy (LR) lors des élections européennes. Mais seule Laurence Arribagé, son adjointe et présidente de la fédération LR de Haute-Garonne, sait pour qui Moudenc a réellement voté. Le maire de Toulouse lui avait en effet confié sa procuration, préférant filer en Grèce pour des vacances familiales lors du scrutin.

Un bouclier pour Macron à la tête de France urbaine

Contrairement au maire de Reims, Arnaud Robinet, qui devra affronter un concurrent LREM pour avoir soutenu Bellamy, Moudenc n'a pas été sanctionné. Les deux élus avaient lancé aux côtés de Christian Estrosi, maire de Nice, un mouvement (La France audacieuse) comme un trait d'union entre le gouvernement et les maires de différentes obédiences. Sans jamais rompre avec son parti, le maire de Toulouse joue la passerelle entre LREM et LR. Emmanuel Macron bichonne Jean-Luc Moudenc parce qu'il peut lui servir de bouclier à la tête de France urbaine, le lobby des métropoles, face aux ambitions présidentielles de François Baroin, maire de Troyes et président de l'Association des maires de France. Christian Jacob n'est pas davantage enclin à suivre son aile droite qui réclame des sanctions à l'encontre de ces élus «collabos». Le nouveau patron de LR était ce dimanche dans la périphérie de Toulouse pour présenter ses vœux. Il a remercié Moudenc «pour sa fidélité»… tout en tapant fort contre le gouvernement.

Doublement adoubé, le maire de Toulouse devra toutefois composer avec la dissidence de Franck Biasotto, ancien adjoint au logement soutenu par le Modem qui se réclame lui aussi de LREM. Il dénonce un «accord purement électoral» passé entre le maire sortant et Jean-François Portarrieu. Ce dernier, député LREM, présente la particularité très «radicale cassoulet» d'être un ancien du cabinet de Pierre Cohen, l'ex-maire socialiste. «Moudenc a peut-être le soutien de LREM, mais il n'a pas celui des électeurs de Macron», affirme Franck Biasotto, réputé «sans étiquette». L'opposition de gauche au maire de Toulouse, divisée, se retrouve au contraire pour condamner «Emmanuel Moudenc, le maire des riches» dans l'une des capitales des gilets jaunes.