Ambiance feutrée au siège de La République en marche jeudi, date du premier point hebdomadaire du parti présidentiel sur les municipales, devant un parterre de journalistes clairsemé. Laetitia Avia et Jean-Baptiste Moreau sont les deux députés envoyés au turbin pour répondre aux questions des journalistes. «Tout va bien ! On aborde ces élections avec énormément d'optimisme», affirme la députée de Paris avec un petit rire gêné. «On n'a pas d'élus aujourd'hui puisque la poignée d'élus locaux que nous avons n'a pas été élue sous l'étiquette LREM. Le 23 mars [le lendemain du second tour des élections municipales, ndlr], nous aurons un ancrage local nouveau», ajoute-t-elle. On a connu formation au pouvoir plus conquérante…
Malgré des sondages peu flatteurs dans la plupart des grandes villes, le parti d'Emmanuel Macron s'en tient à un seul objectif martelé par le délégué général Stanislas Guerini : «Faire élire 10 000 conseillers municipaux.» Aucune projection sur le nombre de villes gagnables en revanche. Laetitia Avia s'en justifie : «On a fait le choix de se concentrer sur l'ancrage dans les territoires. Ce qui nous permet de nous inscrire dans une stratégie de long terme.» Qui dit long terme dit élections sénatoriales. Les marcheurs avouent déjà s'y projeter : «On est conscients de l'influence de ce scrutin sur les sénatoriales qui arrivent à l'automne. On en tient compte», reconnaît Jean-Baptiste Moreau. C'est dire l'importance des conseillers municipaux pour le parti, autant de grands électeurs en puissance pour faire élire des sénateurs marcheurs dans six mois.
600 listes investies ou soutenues par LREM
Alors qu'à la rentrée, le Premier ministre, Edouard Philippe, avait évoqué l'«acte II» du quinquennat comme «celui des territoires», la stratégie électorale de LREM est aussi orientée vers la ruralité, une valeur qui parle au député de la Creuse et agriculteur, Jean-Baptiste Moreau : «Gagner des sénateurs se fera plus facilement en ruralité. Il y a beaucoup de maires sans étiquette, ils sont moins dans des logiques partisanes.» Ça, c'est en théorie. En pratique, sur les 600 listes investies ou soutenues par le parti présidentiel, 540 concernent des villes de plus 30 000 habitants. Pas de quoi effacer l'image de «parti de cadres sup, uniquement présent dans les villes» que désavoue Jean-Baptiste Moreau.
L'accent est également mis sur les candidatures féminines qui représentent 29% des investitures de LREM, soit 143 candidates. Laetitia Avia est enthousiaste : «C'est un sujet très important pour nous, on a un objectif de résultats.» Sept femmes sont d'ailleurs têtes de liste dans des grandes villes françaises : Aix-en-Provence, Amiens, Grenoble, Lille, Nantes, Rennes, Toulon. Seulement, selon les derniers sondages publiés, seule Brigitte Fouré, maire sortante d'Amiens, une UDI soutenue par LR-LREM et le Modem, est annoncée favorite pour conserver sa ville avec 34% d'intentions de vote selon un sondage Ifop du 3 février.
Cachez cette dissidence que je ne saurais voir
Le cas d'Amiens n'est pas isolé. Devant une élection peu favorable à l'émergence de nouvelles têtes, La République en marche mise beaucoup sur les alliances (211 en tout dont 150 avec la droite et 61 avec la gauche). Et pense plus au second qu'au premier tour. «S'il y a des perspectives de fusion avec telle ou telle liste, il faut éviter de se cogner comme des sourds avant le premier tour», prévient Jean-Baptiste-Moreau. Pour une cinquantaine de villes de plus de 9 000 habitants où aucun candidat n'est investi ni soutenu par LREM, le parti a déjà prévu d'adresser des recommandations de vote. Lesquelles ? «C'est une décision politique, qui sera prise par le bureau exécutif» en temps et en heure.
S'il y a bien un sujet qui agace les députés LREM, c'est celui des dissidences. C'est pourtant un des résultats de cette stratégie ouverte d'alliances. «Les cas de dissidence sont minoritaires. Et surtout, on constate que la dissidence ne fonctionne pas puisqu'ils décrochent dans les sondages», tranche Laetitia Avia. Une manière d'évacuer le fiasco parisien annoncé entre Griveaux et Villani et les divers affrontements intestins comme à Annecy ou Metz.