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Réformes

Macron annonce une crise très grave et confirme qu’il faudra travailler plus longtemps

Loi Macron, les réformes qui fâchentdossier
Dans la presse régionale, le chef de l’Etat vante son exceptionnelle relation de confiance avec Edouard Philippe, tout en entretenant le suspense sur la reconduction du Premier ministre.
Emmanuel Macron au G5 Sahel, mardi à Nouakchott, en Mauritanie. (Photo Ludovic Marin. AFP)
publié le 3 juillet 2020 à 8h52

Avant de faire savoir avec quel Premier ministre il prendra le «nouveau chemin» de l'après-Covid, Emmanuel Macron a achevé les consultations engagées depuis le début de la crise avec les représentants des associations d'élus locaux, des partis politiques et des groupes parlementaires. Il a reçu jeudi soir à l'Elysée Richard Ferrand, président de l'Assemblée nationale, Gérard Larcher du Sénat et Patrick Bernasconi du Conseil économique, social et environnemental. Début juin, il les avait tous trois invités à lui indiquer quelles devaient être, selon eux, «les priorités essentielles qui dans ce moment font consensus ou émergent au premier rang des préoccupations» des Français.

Pour conclure cette séquence, le chef de l'Etat a fait paraître ce vendredi matin dans plusieurs titres de la presse régionale un entretien dont l'utilité ne saute pas aux yeux. Sans annonce vraiment nouvelle, il fait office de lever de rideau en attendant deux rendez-vous très attendus : l'annonce du remaniement et la présentation des priorités pour les «dix-huit mois utiles» d'ici à la fin qui quinquennat.

Faire durer le suspense

S'agissant du remaniement, il fait durer le suspense. Il salue «le travail remarquable» et les «réformes historiques» menées par Edouard Philippe. Il vante l'exceptionnelle «relation de confiance» qu'il entretient avec son Premier ministre, la qualifiant même «d'historique à l'échelle de la Ve République». Il se félicite d'avoir nommé «un homme qui n'a pas fait [sa] campagne» mais qui était «dans la même démarche d'ouverture et de dépassement» que lui. Faut-il comprendre que cette relation serait de l'histoire ancienne ? Dans la précipitation du bouclage tardif, deux versions légèrement différentes de la réponse à cette question ont été mises en ligne jeudi soir. Dans l'originale, Macron répond franchement par la négative :  «Au contraire. J'ai fait le choix, en 2017, de prendre à mes côtés un homme qui n'a pas fait ma campagne.» A la relecture, le «au contraire» a été supprimé. L'Elysée craignant sans doute que cela soit interprété comme l'annonce implicite d'une prolongation du bail d'Edouard Philippe à Matignon. Il faut faire durer le suspense… c'est la loi du genre.

Il confirme toutefois qu'il faudra «de nouveaux visages, de nouveaux talents» et «des personnalités venues d'horizons différents» pour gouverner jusqu'à 2022 autour de quelques priorités : relance de l'économie,  rétablissement d'un ordre républicain, défense de la souveraineté européenne ou encore «poursuite de la refondation de notre protection sociale». Ce dernier point passe selon lui nécessairement par une remise en chantier de la réforme des retraites, suspendue lors du confinement. Il maintient que l'instauration du système universel par points serait avantageuse pour les salariés les plus modestes, ceux de «la deuxième ligne» comme les livreurs et  les caissières.

Si «cette réforme ne peut pas être reprise de manière inchangée à la sortie de crise», il affirme que la question de l'allongement de la durée des cotisations, un paramètre jusqu'ici écarté, doit désormais être posée.  Explicitant l'invitation à «travailler davantage» de son discours du 14 juin, Macron estime que la France ne peut atteindre ses ambitions en matière de «reconquête sociale, économique et environnementale» si elle reste «un des pays où on travaille le moins tout au long de la vie en Europe».

Pas de report des élections régionales en vue

Interrogé sur sa vision de la décentralisation, sujet du rapport que lui a remis jeudi Gérard Larcher, le chef de l'Etat se dit «prêt à faciliter les expérimentations», mais il appelle à faire preuve de pragmatisme et à ne pas se perdre «dans de grands débats». Il a refermé la question d'un éventuel report des élections régionales qu'il avait lui-même ouvert au début du mois. Selon lui, elle ne peut être tranchée par lui seul et ne se justifierait qu'en cas de «big-bang des collectivités territoriales et des transferts massifs de compétences».

Alors que le temps est «à la reconstruction du pays» et qu'il faut se préparer à  une rentrée «très dure», il estime que ce n'est pas vraiment une priorité. Mais le deuxième sujet, a-t-il poursuivi, sera celui des «équilibres financiers». «Je demanderai au gouvernement de réengager rapidement une concertation en profondeur, dans un dialogue de responsabilité associant les partenaires sociaux dès l'été sur ce volet des équilibres financiers», a-t-il dit. «Il faut que tout cela soit mis sur la table», mais «il n'y aura pas d'abandon d'une réforme des retraites», a-t-il insisté.

Sur l'ensemble des réformes qu'il a engagées, sources de bien des blocages et des protestations, Macron a par ailleurs reconnu qu'il avait sa «part de maladresse. J'ai parfois considéré qu'il fallait aller vite sur certaines». Un tout petit mea culpa.