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Libération
Disparition

Mort de Marielle de Sarnez, stratège de François Bayrou

Fidèle lieutenante de l'ex-ministre, cette fondatrice du Modem, figure du centre, européenne convaincue et présidente de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée, s'est éteinte mercredi à 69 ans.
Marielle de Sarnez lors des élections européennes de 2008. (Laurent Troude pour Libération)
publié le 14 janvier 2021 à 0h09

Sur la scène politique, Marielle de Sarnez avait imposé son look estudiantin, Converse blanches, jean slim, chemise blanche et blazer bleu sur une silhouette longiligne à la Jane Birkin. L'éphémère ministre des Affaires européennes du premier gouvernement d'Emmanuel Macron est décédée, mercredi soir, à l'âge de 69 ans des suites d'une leucémie. François Bayrou, lui-même, a annoncé son décès à l'AFP et dans un court texte posté sur Twitter. «Voici le jour en trop. Marielle de Sarnez, si talentueuse et courageuse, vient de partir. Notre chagrin est immense», a écrit le président du Modem et désormais haut-commissaire au Plan.

Fidèle

Celle qui a toujours été présentée comme le bras droit de l'ancien ministre de l'Education est entrée en politique en 1974 pour soutenir la candidature de Valéry Giscard d'Estaing. Elle participe alors activement à la création des jeunes giscardiens avant de remplir le même rôle pour la mise sur pied de l'UDF. Dans un portrait que Libération lui consacrait en 2004, c'est à elle qu'on attribue les mémorables tee-shirts «Giscard à la barre». «J'étais cheffe des tee-shirts ! disait-elle. Ce qui me faisait marrer, c'était de faire les choses, de fabriquer, de créer. Je pense que c'est très féminin. Les hommes, eux, se sentent suffisamment heureux avec l'apparence du pouvoir.»

Dans cette UDF en lutte avec le RPR de Jacques Chirac, elle côtoie alors Jean Lecanuet, Simone Veil et Raymond Barre. Sans que sa complicité avec un nouvel arrivant dans la famille centriste, François Bayrou, ne vienne jamais à en pâtir. Lorsqu’il est nommé rue de Grenelle en 1993 par Edouard Balladur, il la nomme simple conseillère. Lorsqu’il en sort quatre ans plus tard, elle est directrice de cabinet. Stratège, meneuse, c’est elle qui, naturellement, dirige les campagnes de Bayrou aux présidentielles de 2007 et 2012. Fidèle parmi les plus fidèles, c’est elle qui reviendra d’Ukraine avec l’idée de l’orange pour la couleur du tout nouveau Mouvement démocrate. C’est elle aussi qui restera convaincue du choix de maintenir un îlot centriste indépendant quand l’UMP chiraquien puis sarkozyste, en 2002 et 2007, tente de ratiboiser ce qui sépare la droite de la gauche.

«Giscard l’a bien fait !»

Députée de Paris depuis 2017, elle était jusqu'à mercredi une présidente respectée de la commission des Affaires européennes. Conseillère de Paris de 2014 à 2020, c'est surtout au Parlement européen que Sarnez a déployé toute son énergie en y siégeant sans interruption de 1999 à 2017. Ce même Parlement de Strasbourg qui lui ôtera un graal. Mise en cause dans l'affaire des emplois fictifs des assistants parlementaires du Modem, elle doit démissionner à peine un mois après sa nomination, avec les autres ministres de son parti (François Bayrou et Sylvie Goulard) du premier gouvernement d'Edouard Philippe. Un gouvernement dont elle aura été une des chevilles ouvrières en convainquant Bayrou de se rallier à la candidature d'Emmanuel Macron, jeune ministre de l'Economie de François Hollande. Un homme qu'il vitupérait auparavant comme représentant tout ce qu'il détestait, «aux mains des puissances d'argent».

«Je n'imagine pas ma vie sans servir un intérêt plus grand que moi», disait-elle en 2004 et croyant alors en les chances de Bayrou, elle affirmait : «Je ne sais pas comment sera la France en 2007. C'est une alchimie compliquée. Mais après tout, Giscard l'a bien fait !» Bayrou n'y est pas arrivé. Macron oui. Pour convaincre, Marielle de Sarnez savait penser sur trois plans, celui de Bayrou, de l'intérêt politique pour le parti et de celui de ses troupes. Pour tout cela, elle aura été indispensable à celui qu'elle a accompagné tout au long de sa carrière. Sa disparition est une perte importante pour la première force politique alliée à Emmanuel Macron.