Raymond ne peut pas s'en empêcher. «Il faut que je parle (il coupe
la parole à tout le monde). Je suis petit, alors je me grandis comme ça.» Mais sa logorrhée est démocratique. Thierry Argiro, l'adjoint au maire PS chargé des affaires sociales du Xe arrondissement, se fait chambrer. «Toi, t'es Peppone, super-socialo; moi Don Camillo, super-catho.» Comme ce SDF, de passage à l'accueil de jour que dirige Raymond: «T'es fauché, mais au moins t'es grand.»
Le petit catholique chambreur, c'est Raymond Manna, ex-guitariste et manager du groupe Trust, «folies de jeunesse», ex-ponte du show-business, «j'ai brassé, quoi», et actuel responsable du Camres (Centre d'accueil médical et de réinsertion économique et sociale), «ça c'est sérieux». Aujourd'hui, son QG n'est plus un studio ou une maison de disques, mais un local au fond d'un passage proche de deux gares, du Nord et de l'Est. Un périmètre où survivent de 1 000 à 2 000 personnes, «on n'arrive pas à les compter». Raymond les accueille, les nourrit, les loge, tente de les réinsérer et leur parle. «Attention, hein, c'est pas mon boulot, c'est bénévole.» Un bénévolat de cinquante heures par semaine. Le reste du temps? «Je brasse encore.» Dans l'immobilier et l'événementiel d'entreprise, «du lucratif. Plus j'en prends, plus je peux en refiler à ceux qui n'ont rien». Robin des Bois? «Ivanhoé plutôt», le héros toujours loyal de la télé du tout début des années 60. Souvenir d'enfance à Argenteuil. «Avec les parents, on n'avait pas beau