La voix un peu blanche, il porte les stigmates des grands crus
littéraires qu'il sert chaque soir avec délice au public du théâtre de la Renaissance. Nietzsche, Baudelaire, La Fontaine, Céline, à boire cul sec, jusqu'à l'ivresse. Devant un citron pressé chaud, Fabrice Luchini se renfonce dans le siège d'une arrière-salle d'hôtel parisien pour mieux vous fixer de son oeil d'oiseau inquiet. «Un portrait de moi? C'est voué à l'échec. Parler de soi est une impasse absolue.» Plus tard, devant Rita Scaglia, la photographe de Libération, il tire tout autant le rideau de fer: «La photo est un mensonge total. Imaginez qu'on me photographie sur une plage de Tunisie avec une femme que je ne peux pas supporter. Après, on croira que j'étais heureux!» S'empresse d'effacer le sourire de Joconde qui le mitraille: «Vous êtes heureuse en couple? Je veux dire" à tous points de vue?" Je ne supporte pas les gens heureux!»
Ainsi court Luchini. Grattez-le là où ça ne le chatouille pas hors champ de la représentation de lui-même , et le furet joue la provoc en forme de leurre pour faire de vous l'imbécile du précepte zen: «Quand le sage montre la lune, l'idiot regarde le doigt.» Des tonnes d'interviews ont passé au scanner sa vie d'artiste paladin et son dandysme séducteur. Mais pour ce qui est de «l'immonde exercice du commentaire de soi-même,» circulez, y a rien à voir. Prière de s'en tenir au ludion du cinéma français qui, avec Pas de scandale de Benoît Jacquot, aujourd'hui à l'affiche (Libér