Pas si jolie que ça, non: pas si grands, les yeux velours, trop grande, la grande bouche et peut être trop frêle, le corps sinueux" Un cocktail d'excès féminins provocant de séduction, pourtant. Et attisé, pour l'interlocuteur, par la sensation vaguement périlleuse d'une intelligence affûtée qui ne pardonnera rien, ni surtout les défilades. Menue silhouette au chic passe-partout, Yasmina Reza, venue seule dans le salon du grand hôtel qu'elle a choisi pour l'interview, existe intensément, entre quat'z-yeux, sans se donner la peine de déplacer beaucoup d'air.
Nulle ostentation, chez elle, qui signale la star: l'auteur dramatique français le plus international du tournant du millénaire. Une stature acquise en quatre pièces bardées de molières, dont celle-là, surtout, jouée à guichets fermés, qui lui colle à la renommée et n'en finit plus de faire le tour du monde: Art, confrontation entre trois quadragénaires autour d'un tableau blanc, interprétée (à son corps défendant) comme une polémique sur l'art moderne, traduite dans 35 langues et montée dans des centaines de productions, de la Schaubühne de Berlin au Royal Wyndhams Theatre de Londres (où elle tient l'affiche depuis quatre ans), en passant par Tokyo, Bombay, Johannesburg, Buenos Aires et Bratislava.
Ce genre de succès en aurait paralysé d'autres. Pas Yasmina Reza, qui a continué d'avancer à son rythme (erratique), et dont la saison 1999-2000 prend un tour mutant: elle a fait ses débuts de romancière à la rentrée en publian