La mondialisation est un leurre. C'est la présidente de l'Observatoire de la mondialisation qui l'affirme, d'une voix tranchante mais calme, au timbre minéral mais doux, à l'accent américain et frenchy à la fois. «Ce n'est pas un concept, c'est un slogan. ça veut donner le sentiment de l'inéluctable, comme la marée. Or c'est un processus impulsé par les multinationales.» Susan George se méfie des mots. Même les plus anodins cachent des logiques, des sens, qu'il faut débusquer. «Antimondialisation» est un mot libéral, dit-elle, une étiquette qui discrédite ceux qu'elle est censée définir. Trop réducteur, trop simple. Car les fers à croiser n'ont jamais été aussi nombreux. Il y a d'abord eu l'«épuisement» de la terre et le «pillage» des pays en développement. Puis l'«arme» de la dette et le «double jeu» des arbitres (FMI, Banque mondiale, OMC) qui prétendent (dé)réguler le monde. Maintenant, la «démission» des Etats-nations et l'«impunité» de la sphère financière l'alarment. Tant de combats, de raisons de se révolter. Parce que «les institutions internationales sont discréditées» et que manque, dit cette amoureuse d'opéra, un «chef d'orchestre» pour remettre en musique un «système hors contrôle, incapable de voir qu'il court à sa propre perte». Se dresser, donc, pour ne pas se soumettre.
Vigie plutôt que pythie, elle a choisi, depuis trente ans. Avant-hier, elle initiait les comités Viêt-nam ou Greenpeace. Hier, elle prenait part à la victoire de Seattle. Dimanche, elle par