On croit qu'il s'offre. Tellement sympathique, et direct, et
sensuel. Et on se fait avoir. «Quelqu'un qui n'aime pas mes chansons ne m'aime pas, je n'ai rien à lui dire.» Il faudrait répondre qu'on adore quand il lance: «Vous avez écouté mon album?» Ce n'est plus une interview, c'est une sommation. La campagne publicitaire vendait «Bruel a changé, il a 40 ans. La maturité, l'introspection». Mais il transforme un bon déjeuner en question de vie ou de mort . D'un côté les fans, de l'autre les ennemis. Qu'on lui résiste et le masque lumineux se plombe. Aucune nomination aux Victoires de la musique: «Ça veut dire que je n'existe pas pour ces gens-là.» A la différence des autres, il ne cache pas la terreur mortelle que lui inspire l'indifférence. «Vous ne pouvez pas me comprendre si vous n'avez pas assisté à un concert.» Il dit «mon album c'est moi», avec la rage d'un gamin qui se croit Zorro parce qu'il a une cape noire sur le dos. Il faudrait succomber, ou alors s'en aller.
Même quand il croit se donner, il séduit, à fond. Et ça ne lui demande pas tant d'efforts à cet irrésistible: «Plus je me découvre, plus je me plais. Je suis bien avec moi-même.» C'est une vieille cohabitation, presque une grâce. «J'ai toujours eu du succès. A 15 ans j'étais déjà le centre de la bande, j'organisais, j'attirais.» Il précise que le sex-appeal ne lui est pas venu, «comme pour certains», avec la célébrité. «Depuis que j'ai 13 ans je plais aux filles. Je n'étais pas le plus beau, pas le plus moch