Le voilà qui s'avance dans le prétoire, mains jointes derrière le
dos, tête baissée, l'oeil farouche. Thierry Lévy n'est pas un avocat affable. «Il est indigné par toute injustice, hostile à tout pouvoir, toute loi, tout juge, il est pour toujours du côté des vaincus», écrit de lui son ami Jean-Denis Bredin. Samedi, Thierry Lévy a été élu président de l'Observatoire international des prisons. Jamais il n'a appartenu à aucune association, mais la cause de celle-là lui est familière. «Quel grand honneur!» a-t-il répondu à Catherine Erhel, la présidente sortante, quand elle lui a demandé de prendre sa suite. Elle en sourit: «J'ai cru qu'il blaguait, en fait il a été sensible au fait qu'on l'aime et qu'on vienne le chercher.»
Son dégoût profond de la privation de liberté remonte à ses premiers souvenirs. Enfant, il s'interroge: «Pourquoi punit-on ceux qui ont fait le mal et récompense-t-on ceux qui ont fait le bien?» Etudiant, la haine le prend devant le bagne et l'île du Diable, où a été cloîtré Dreyfus. Avocat, il réfléchit à «l'absurdité du châtiment» et, quand il visite son premier client incarcéré à Fresnes, il ressent: «un choc violent, terrible, une nausée, un haut-le-coeur».
A 26 ans, il défend Claude Buffet, assassin de deux otages à la centrale de Clairvaux, lors d'une tentative d'évasion. Ceux qui ont écouté sa plaidoirie se souviennent de cheveux drus et noirs, d'une silhouette un peu frêle. Et d'un rugissement de bête. De cette voix qui, «dès qu'elle s'élève, vous pre