Menu
Libération
Portrait

Un diable dans sa boîte.

Article réservé aux abonnés
publié le 8 juin 2000 à 2h01

Ce jour-là, Gérard Verdier a limité la fantaisie aux accessoires: lunettes teintées jaune citron, volumineuse bague indienne au petit doigt, ceinture en plastique vert céladon. Assis dans un café parisien, il attire les regards. Le geste est ample, le discours incessant, entrecoupé de «pfffuit» appuyés. Au moindre agacement, les yeux partent au ciel, à la moindre émotion, la voix s'envole dans les aigus. Le portable sonne, fébrilité instantanée. «C'est toi, Zazou, on se rappelle ce soir, cocotte. Bisous.» Gérard Verdier est ainsi: joyeux, grande folle et fier de l'être. «J'ai besoin d'un excès de verbe et de geste pour appuyer l'idée que je défends», dit-il.

Depuis vingt-six ans, il milite à la CGC, Confédération générale des cadres. Directeur d'un magasin de vêtements Armand Thiery dans un centre commercial de Créteil, il ne partage ni les complets ni les idées de ses collègues. L'attelage semble incongru, contradictoire. Il repose sur un engagement syndical hors pair, version dentelle viscose. «Ma façon de m'habiller est politique. Vous prônez la réussite via l'uniforme du costume, je vous prouverai le contraire.» Armand Thiery (1) fait du «classique actuel» depuis 160 ans, lui adore les créateurs, «Jean-Paul [Gaultier], évidemment». Avec ses bagues ventrues et ses propos enflammés ­ il emploie facilement le mot fasciste ­, il est le «diable» dans la boîte. Là où chacun courbe l'échine, lui revendique tel un métallo, délaissant le vernis lissé de sa caste. «Vous n'êtes pas