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Libération
Portrait

Du plein sur la planche

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publié le 23 août 2000 à 3h36

A écouter Pascal Rabaté raconter sa success story à trois balles dans le décor clinquant de la brasserie La Coupole, à Montparnasse, l'indiscret voisin de table pourrait se méprendre sur l'activité du narrateur. Plein le dos de ces start-upper, néo-entrepreneurs à la mords-moi-le-noeud. Pourtant, ce conte de fées moderne vaut qu'on lui prête oreille: il parle de bulles et de cases, il y est question d'un bouquin dégoté, 3 balles justement, chez un pucier de Poitiers par méprise ­ «Pas fait gaffe au prénom de l'auteur» ­, de son adaptation BD présentée sur 20 pages, au lavis, dont aucun éditeur ne voulait. Enrhumés, les professionnels de la profession. Car l'adaptation d'Ibiscus par Pascal Rabaté, d'après l'ouvrage signé Alexis Tolstoï en 1924, a donné vie à la bande dessinée la plus surprenante de ces dernières années, au graphisme expressionniste fulgurant et à l'écriture visuelle unique, sorte de théâtre d'ombres aux frontières du septième art.

Alors, Pascal Rabaté, brun médium, 39 ans, aux lunettes cerclées, baskets noires, jean et blouson de cuir, confesse avec simplicité ces deux premiers volumes torchés au pinceau et à l'encre noire, à la plastique de la déformation et du flou. Un dessin aquarellé, aux confins de la gravure, qui aligne les cadrages déjantés, à mille lieux de la ligne claire, l'école classique et veine surabondante de la BD, filiation belge. Successivement pompiste de nuit, fabricant de médailles Saint-Christophe, modèle aux Beaux-Arts où il a étudié pen

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