Cela a l’air très con à préparer, un poulet au curry. Seulement, derrière les senteurs lourdes des épices ou le friselis tressautant de la volaille qu’on sait, il y a la façon dont Elsa raconte comment et pourquoi elle en a fait une recette. Elle dit s’être mise récemment à l’art d’accommoder les viandes, mais les révélations tardives ne sont pas forcément les moins pesées. Elle admettra vite qu’il lui faut a fallu, faudra souvent poser, sur les deux plateaux de la balance, l’indécision qu’elle sait propre à son signe zodiacal. Le piment oiseau et l’envie de se mettre en danger devant une caméra, les morceaux de banane et les rendez-vous du soir avec un rôle déjanté, le bouillon cube et «le corps qui parle, la grâce qui est là, avant les mots à réciter». Il sera donc question ici de cuisine. Et de plein d’autres choses, d’huître qui s’ouvre, de manteaux qu’elle superpose, ni cuirasse ni rempart contre le froid, plutôt pour épaissir une carrure de jeune actrice, sans dévoiler le mystère ni tous les traits de caractère. D’un salon de thé même: «J’aime ce qui est cosy, les petits boudoirs» qu’on croyait réservés aux mémères des beaux quartiers, si chic et si sans vie. De prédestination, de fatalité et de hasards actifs dans lesquels elle «voi[t] des signes.»
Le débit serait celui d'une fontaine ardente, intarissable, pétillant derrière l'inquiétude. «Je flippe à l'idée de parler de moi, je suis tellement anxieuse, obsédée par les mots que j'emploie. Ma grande quête, c'est d'