Histoires de rencontres. Du siècle. De misère. D'immigrés et d'émigrés. D'un mariage entre un ouvrier agricole et la petite-fille d'un montreur d'ours. D'un beau gosse illettré, passé par un salon de coiffure et qui, finalement, pousse les portes du château du Tariquet dans le Gers et voit s'ouvrir un monde à la Charles Perrault avec les domaines de la Jalousie, du Mage, et d'autres, qui en font la première exploitation viticole de France: 490 hectares auxquels s'ajoutent autant de loués pour le raisin. Une PME de 45 personnes au top de la vinification. Avec à l'arrivée, plus de 6 millions de bouteilles de vins de côtes de Gascogne, 50 000 d'armagnac.
Hélène, sa femme, l'appelle «papa». A 84 ans, «et demi», précise-t-il comme un enfant, Pierre Grassa ne s'est toujours pas fait à la richesse. «Moi, le misérable du coin, je suis là», murmure-t-il avant de reboucher les bouteilles qui traînent à côté de l'alambic. Il dit aussi sans afféterie: «Je suis né dans la misère.» Son père venu d'Espagne à pied en 1915. «Il a commencé à débarder du bois dans les Landes, à se placer comme domestique agricole. Ma mère était malade, il a élevé tout seul ses cinq enfants.» Dont lui, né en France. Pas de scolarité. A 8 ans, il garde les vaches. A 19 ans, il est toujours ouvrier agricole. La rage au ventre. Et un rêve en tête: «Etre comme tout le monde.» S'en sortir. Par la coiffure: «Personne ne voulait de moi. J'étais un paysan. Un gars d'Eauze s'est proposé de me dégrossir pour me permettre