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Portrait

Senior cinéma.

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Manoel de Oliveira, 92 ans. Alors que sort «Parole et utopie», le cinéaste portugais a fini un nouveau film et entame le suivant.
par Hervé AUBRON
publié le 19 janvier 2001 à 22h00
(mis à jour le 19 janvier 2001 à 22h00)

Il n'y a que les fous ou les enfants pour courir après le soleil, pour l'attraper. Ou vous, un après-midi sur les quais de Porto, tentant de tenir le rythme de Manoel de Oliveira. Un resplendissant vieil astre, fendant d'un pas décidé la lumière blanche réverbérée par les eaux du Douro et les entrepôts décrépits. Il rit, trottine, silhouette droite, un grand chapeau comme une auréole. Toujours une longueur d'avance, un malin plaisir à vous semer, vous prendre à revers. Il monte les escaliers en caracolant, mange comme quatre, voit loin, entend selon son bon plaisir. Il a 92 ans.

Parole et utopie, son vingtième long-métrage, vient à peine de sortir en France. Il a déjà fini le suivant et il prépare le troisième. «J'ai eu le temps de réfléchir. Les idées sont déjà là, il suffit de les laisser sortir.» Sidérante prolixité, réflexes imparables. Durant les derniers jours de tournage de Parole et utopie, à Rome, un acteur italien a des problèmes de mémoire. Il jette l'éponge, dit à Oliveira qu'il «rentre à la maison». Il s'en sort grâce à des cartons où les répliques sont inscrites. L'épisode émeut le cinéaste. Il griffonne sur un journal le synopsis du prochain film, auquel il s'attelle dès le lendemain. Piccoli y incarne un acteur qui ne se souvient plus de son texte. Titre: Je rentre à la maison. Rien ne se perd, tout s'enchaîne à la vitesse de la lumière.

Difficile de faire asseoir le vieux soleil sur son canapé. Toujours du café à aller chercher, un texte à imprimer sur son ord

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