Pierre, c’est l’oncle rigolo que l’on a vu, depuis tout petit, animer les repas du dimanche en famille, gesticuler, grimacer, gaffer, bafouiller, chuter à l’envi. Un jour il jouait le distrait, un autre un grand blond avec une chaussure noire, une autre fois il faisait le timide qui se soigne, ou encore une chèvre. Tout le monde autour de la table se tordait. Avant que notre pitre attitré ne soit soudainement plus invité à ces agapes rituelles. Et puis voilà qu’une quinzaine d’années plus tard, il s’est manifesté discrètement, de retour en ville. La famille l’a découvert en décembre dans l’excellent téléfilm Sans famille, elle qui le croyait sous les tropiques, comme l’oncle Antoine, à prendre du bon temps en attendant le mauvais. Pourtant cela ne leur a pas donné envie de l’inviter à la maison. Ils ont pensé que le passé, c’est le passé, et qu’il faut savoir vivre avec son temps. Que Pierre ne les fait plus autant rire qu’avant. Qu’il est un peu démodé. Et qu’il y a maintenant d’autres comiques dans la famille pour animer les soirées.
Un coup d’index sur la sonnette d’un immeuble cossu du XVIe arrondissement. Tonton a ouvert. L’intérieur de son ancien atelier aménagé en habitation était lumineux, verdoyant et même boisé, décoré par ses nombreux voyages. Une musique latino flottait dans l’air. Il a expliqué qu’il avait passé beaucoup de temps à Cuba, pour un documentaire sur le Che. Il a maintenant 66 ans, une barbe sable et sel de quelques lunes, sa coiffure à la