Louis-Gaston Mayala a enfilé son habit de cour: complet crème, cravate chatoyante, chaussures d'autruche crème. Sous l'oeil de la caméra de surveillance, il a pris position dans le salon VIP du palais de la Rénovation, moquette acrylique à ramages rouge et or. Dignitaire du régime, il s'apprête à patienter des heures pour une audience avec le président Bongo, bercé par Euronews. «C'est triste ce qui se passe en France, dit Mayala. Tout ce que de Gaulle et Foccart ont voulu, on l'a fait. Le Gabon ne voulait même pas de l'indépendance...»
Mayala fixe la galerie de portraits qui court le long du mur, gouverneurs et administrateurs de l'Afrique-Equatoriale française. «On nous dit que le patron est corrompu. Pour qu'il y ait corrompu, il faut qu'il y ait corrupteur...» Au milieu de la galerie d'ancêtres blancs une porte s'ouvre sur un minuscule personnage. El Hadj Omar Bongo, président du Gabon depuis trente-quatre ans. Costume Mugler, Omar Bongo traverse la salle du conseil, draperies au kilomètre, glands d'or au poids, salpêtre floquant les plinthes. A main gauche, écrans télévisés. A main droite, album de famille. «C'est le village, ici, dit Paul Toungui, gendre et ministre du Pétrole. Il vit au milieu des siens.» Les photos d'une trentaine de beaux enfants, avec lesquels le Président vient de fêter ses 66 ans, sont les plus proches de sa table de travail Napoléon III. Au fond, les parrains adoptifs. Bongo avec le général de Gaulle, avec Georges Pompidou. En 1977, disco Bongo w