On s'attend à rencontrer un prince de l'équivoque, et on tombe sur une version anglaise de l'esprit cartésien. A Paris il y a quelques semaines pour l'arrivée du Retour au répertoire de la Comédie-Française, Harold Pinter, 70 ans, le Britannique sans doute le plus joué au monde, porte beau complet et chemise noirs et se livre à l'entretien avec une courtoisie extrême (la courtoisie est toujours extrême, comme les voeux sont toujours les meilleurs). Autant ses pièces font la part belle à tous les jeux de sous-langage, autant l'individu tient à éviter les malentendus. Inutile de s'appesantir sur sa vie privée, qu'il estime non sans raison ni plus ni moins intéressante que celle du pékin moyen. On aura donc confirmation de ce qui est de notoriété publique: deux mariages, un premier en 1956 avec la comédienne Vivian Merchant, le second en 1980 avec lady Antonia Fraser, auteur de polars et de pavés biographiques, pas d'enfant. Hobby? Le cri cket, un sport dont les Français ont renoncé depuis toujours à déchiffrer les arcanes. Voila pour le Pinter intime. Mais il est un autre Pinter ici presque totalement ignoré, celui de l'intellectuel engagé, dont la Grande-Bretagne a laissé de si rares exemples qu'il suffit des doigts d'une main sans pouce pour en faire le compte. Citons Bertrand Russell, fondateur du tribunal qui porte son nom, George Orwell, et, pour revenir du côté de la scène et des vivants, son confrère Edward Bond.
Car si le théâtre de Harold Pinter est celui de l'indécida