Juché sur un rocher, Guy Journet est inquiet. Il a perdu de vue une vingtaine de brebis qui folâtrent à flanc de causse en taquinant les premières touffes d'herbe printanière. L'ordre jaillit: «Pelous, fais le tour!» Le chien, jusqu'alors allongé sur un tapis de feuilles mortes, entame une large boucle autour du vallon hérissé de châtaigniers. Un grondement sourd dans les genêts, une patte pincée par les crocs, un concert de clarines et les fugueuses rejoignent la «draille» (piste).
Le berger jette un dernier coup d'oeil dans les fourrés, puis vers les monts Aigoual et Lozère aujourd'hui noyés dans les brumes. «Et voilà, tout le monde est là», lance-t-il avant de reprendre la tête du troupeau de 275 brebis, agnelles et moutons. Au premier rang, toujours prêtes à profiter des friandises que Journet a glissé dans sa poche, il y a Pitchoune et Bouchara. Et puis Pipette, Bambinou, Titoune... Chaque bête a son nom. Tous les jours, aux alentours de midi, Guy a rendez-vous avec elles à la bergerie du col de Peyrefiche, pour une balade de 20 kilomètres entre garrigue et piémont.
Dernier producteur de moutons de Campredon, un village gardois accroché aux contreforts des Cévennes, Guy Journet n'a «jamais quitté le pays». Il connaît par coeur les moindres recoins de ses forêts, celles-là même que son grand-père, puis son père ont arpentées avec leurs troupeaux. Ce Cévenol de 35 ans, devenu berger par tradition familiale et par amour pour ces montagnes striées de sentes rocailleuses, «ne