Il doit regarder l'heure. «Il n'est que temps», soupire-t-il dans le téléphone. C'est qu'à son horloge médiatique (la seule qui semble fonctionner chez lui), il se fait déjà tard. Il est forcément jauni et racorni le journal qui n'a pas encore offert ses pages à ce totem branché, écrivain gay, qui trempe ses mots dans la colère, le sperme et la mégalomanie, arrive perruqué à la télé et vomit l'ordre hétéro bourgeois dont il est l'enfant. Il a donc dit oui, de haut. De trop haut pour que l'escabeau ne dépasse pas dans le décor. Huit jours plus tard, au café qui tient lieu de rendez-vous, il arrive frêle dans son cuir déniché aux puces, sans flingues dans les yeux, ni reproches en poches. Se faire une réputation d'insupportable, puis se révéler très fréquentable... vieux truc de dragueur de gazette.
Son curriculum vitæ commence comme celui d'un autre. «C'est une série d'abandons des choses que j'aurais dû être pour faire plaisir à tout le monde.» Il s'appelait William Baranès, fils d'une architecte d'intérieur et d'un psychiatre renommé rapidement divorcés, et il a essayé de faire plaisir à tout le monde. Enfant qui éreinte ses yeux plus que ses genoux. «Nous n'avions pas 10 ans, nous passions l'été ensemble, il me fascinait par une intelligence impressionnante, une culture hors normes», se souvient Jean-Marie Durand, aujourd'hui journaliste. Adolescent des premiers rangs qui deviendra surdoué de la Ré publique: premiers prix d'anglais et de français au concours général... «Com