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La cape et l'épi

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publié le 7 août 2001 à 0h21

«Mes travailleuses», a dit Jean-Louis Darré tout à l'heure, en regardant ses mains comme des étrangères.

Au repos, ces mains lourdes comme deux bons gros pains du dimanche ont un air emprunté. L'air d'avoir envie que ça finisse, la visite, la parlote, qu'on passe à la poignée, adieu. Il y a du boulot, les quatorze heures de travail, sept jours sur sept, c'est elles. Et lui raconte sa «folie», l'histoire de ce paysan qui mourait de la PAC (Politique agricole commune), devenu éleveur de toros de combat. Toujours «pelé», mais heureux.

Avant, la vie était sombre, au Cantaou (Gers), «le lieu qui chante». Cinq générations de paysans pour finir au téléphone, à se justifier devant un directeur du Crédit agricole, à emprunter pour le prochain système d'irrigation électronique, qui boursouflera le maïs primé par Bruxelles.

Une femme, deux fils, les vieux parents dans la maison d'à côté, et ses deux bras pour nourrir tout le monde. Jean Louis Darré éprouvait «une haine terrifiante», à se faire craquer les jointures. Côté soleil, il y avait juste la corrida. Toros, vin, bouffe, potes. Et le flamenco qui n'a besoin que d'une voix, une guitare et deux mains pour exister. C'est un art, frapper, les paumes perpendiculaires et en creux pour emprisonner l'air et le faire sonner. Toutes les mains ne sont pas musiciennes, «les travailleuses» ne s'en sortaient pas mal. Puis elles ont appris le nouveau métier du patron, «valet d'épée».

Jean-Louis Darré avait rencontré le torero Michel Lagravère, il é