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Libération
Portrait

Stephan Eicher Nomade’s land

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Stephan Eicher, 41 ans, chanteur polyglotte, voyageur à passeport helvétique. Cultive une marginalité luxueuse et sort un best of.
publié le 1er novembre 2001 à 1h29

C’était une envie vague. Celle de rencontrer un accompagnateur de longtemps, un cousin multilingue (allemand, anglais, français et aussi suisse-allemand, suisse-italien), un rêve d’Europe artistique hors zone euro obligée, une voix graillonnante à la Bob Dylan, un squatteur d’hôtels et d’inconstance, un gitan d’antan à la moustache d’arquebusier. Stephan Eicher, quelqu’un avec qui on avait déjeuné en paix, sans remords, ni regrets, vêtu d’un manteau de gloire, en lui chantant: «Pas d’ami comme toi» ou «Tu ne me dois rien». Prétexte: un «best of», et aussi la destruction de l’hôtel Hess, à Engelberg, où, voici quelques années, il avait enregistré son album le plus prolifique, histoire de voir comment vieillit la créativité, comment s’empâte l’énergie, comment s’enchaîne le nomadisme. Circonstances: l’immédiat après-attentats et son remix des priorités, avec hésitation entre «tout change» et «je maintiendrai».

Il est là, silhouette noire habituelle, qui se rencogne dans une tache de soleil, matou étirant son indolence plus que griffeur de gouttières. Il a 41 ans, il dit: «On arrête de fumer, on prend quelques kilos.» Il ajoute: «On est mieux qu'à 25 ans, moins bien qu'à 35. Faut résister... On a appris le chemin, les choses à ne pas faire.» Et l'alter ego de Philippe Djian, écrivain et parolier, de poursuivre: «C'est l'âge où des amis disparaissent. On se demande: "Pourquoi lui?" Je n'aime pas cette douleur-là. Si je pouvais la changer, je le ferai.» Eicher a le français brilla