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Libération
Portrait

Tchétchène de vie

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publié le 9 janvier 2002 à 21h37

Dans son dos, un poêle à bois. Au-delà des vitres, la nuit glacée d'une forêt. Cela pourrait être quelque part en Russie. Mais c'est ici. Au bois de Vincennes. A la Cartoucherie, devant un auditoire de hasard (les spectateurs qui se sont attardés après le spectacle du Théâtre du Radeau), Oumar Khanbiev parle. Les yeux fermés, il parlera encore. Un soir, trois soirs. C'est que cet homme a beaucoup de silences à rattraper, de mensonges à lacérer: tout ce qui est tombé sur le dos de son pays, la Tchétchénie. Une terre qu'il décrit comme étouffée sous une «montée de l'indifférence» que le 11 septembre n'a fait que radicaliser. En Tchétchénie, la guerre continue. Comme avant, pire qu'avant. Oumar Khanbiev, grand gaillard au parler doux, est un homme fatigué mais obstiné. Un chirurgien qui ne peut plus diriger un service hospitalier. Un ministre de la Santé fantomatique d'un pays où il ne peut plus entrer que clandestinement tout en vivant avec sa famille (marié, deux enfants) «dans la région».

Une fois encore, il reprend tout depuis le début. «Cela fait quatre cents ans que les Tchétchènes essaient de sortir du joug de la Russie. Et cela fait autant de temps que les Russes nous considèrent comme des barbares. Tout a commencé avec la conquête du Caucase, au XVIe siècle...» A cette époque, la Tchétchénie n'était pas islamisée. Quand elle le fut, les Tchétchènes conservèrent leurs traditions. «Chez nous, les femmes n'ont jamais porté le tchador. Et dire qu'on voudrait nous présenter

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