Au café de l'Est parisien, assis sur leurs fauteuils tressés de gros macaronis roses en plastique, deux hommes jouent un peu aux Dupond et Dupont latinos. Aussi raides et retenus au premier abord que leur mobilier est vibrionnant et exubérant. Dans ce nouveau bistrot du Xe arrondissement de Paris, les frères Campana, designers brésiliens, ont dessiné sièges, paravents et tables-araignées, tout en transparence fluorescente. Qui est Humberto, qui est Fernando ? Il faut quelques minutes pour les séparer, ces faux jumeaux qui ont huit ans de différence et qui mijotent le même sourire narquois. Ils expliquent ce méli-mélo. «On ne le fait pas exprès, on achète nos vêtements séparément, et pourtant on choisit les mêmes.» Et de montrer leurs tenues noires quasi identiques.
Fernando tripote avec un contentement de môme leurs objets en métal tricotés avec des tuyaux d'arrosage, irisés par un timide soleil de mars. Car leur truc, aux Campana, eux qui ont mis une sacrée samba dans le design, c'est de travailler les matériaux de récupération brésiliens pour leur redonner noblesse et contemporanéité, tout en leur conservant décalage et humour. Leurs pièces phares: le siège Vermelha, qui apparaît tout ébouriffé de corde, est en fait très élaboré ; la chaise Anemone semble flotter de tous ses tubes ondulants alors que c'est une assise fiable. C'est avec ce travail déstabilisant qu'ils se sont présentés sur la scène internationale, il y a dix ans, eux qui ont titré provocateurs leurs prem