Samedi 14 h 30, métro Ménilmontant. Les amis du Mouvement spontané des citoyens dans la rue, alias Spontané, se glissent dans la manifestation qui commence. Ahmed, tout petit, tout menu, court vers la tête du défilé, une immense banderole «Urgences sociales» en accordéon sous le bras. «On se met devant», crie-t-il aux deux filles réquisitionnées pour porter. La place étant solidement occupée par le DAL, ils se faufilent au quatrième rang. Ahmed, tout en marchant, sort une banderole plus pratique, plus lisible «Mouvement spontané des citoyens dans la rue» et entraîne les filles sur le côté. Ils cheminent en parallèle. Puis, il refile la banderole à un copain qui porte déjà une guitare, et part lever le poing tout seul devant.
Ahmed Meguini n'est pas né de la dernière manif. «C'est un malin, un charmeur», dit Elise, une copine récente. Porte-parole d'un mouvement né dans le cyclone du 21 avril, il surfe sur la vaguelette citoyenne qui en a découlé. Il a plaqué un boulot de chauffeur-livreur et une formation de comédien, et fait un emprunt pour payer le loyer de sa chambre à Montmartre. Propulsé, au nom des jeunes, des réveillés, des indignés, sur les plateaux de télé et dans les cabinets ministériels, il prêche avec exaltation une «nouvelle citoyenneté» aux contours flous. Le nouveau citoyen est «apolitique» mais pas dépolitisé, libre mais responsable, informé mais pas intoxiqué... Ahmed : «Il ne peut pas y avoir de révolution collective sans révolution personnelle. Que chacun