Quand il se sent d'une humeur provocante, il arbore ses boutons de manchette à l'emblème de l'euro. Une gageure dans une Grande-Bretagne aussi fermement attachée à sa monnaie qu'à sa souveraine. «Je les mets pour énerver les conservateurs», déclare-t-il. Dans sa circonscription de Rotherham, au nord de l'Angleterre, loin de Londres, de ses débats d'experts et de ses subtilités vestimentaires, il ne les porte pas. «Ici, c'est un sujet mineur.» Parmi ses électeurs qui autrefois descendaient dans la mine ou battaient le fer, le dossier dont il a la charge suscite des réactions plus viscérales. «Lorsque je fais du porte-à-porte, les gens me disent qu'ils n'ont pas fait la guerre pour être dirigés par des Allemands.» Son métier consiste à vendre l'un des articles les plus dépréciés du royaume. Depuis le dernier remaniement ministériel, il est le «monsieur Europe» du gouvernement. Une tâche difficile dans une île où l'europhobie a longtemps été un sport national. Denis MacShane est pris en sandwich entre ses concitoyens sceptiques et ses homologues méfiants. Il doit persuader les siens que le diable ne se cache pas à Bruxelles et convaincre, outre-Manche, qu'Albion ne redevient pas perfide. Un soupçon qui resurgit avec encore plus de force par temps de guerre en Irak et d'alignement sur les Etats-Unis.
Lorsque Tony Blair lui a téléphoné pour lui annoncer sa promotion, il a été surpris. Pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ? L'homme est connu pour être un «fanatique de l'euro». Or la