Ce jour-là, Londres enrage, la presse britannique éructe une bile antifrançaise. Col ouvert sur Lambswool double fil, calé dans son fauteuil de rotin, le professeur Bob Edwards parle bas, aussi aimable que la verte campagne qui s'enroule autour de sa ferme de Cambridge : «Je dis à la France : Jacques, vas-y, tu as raison sur l'Irak, il n'y a aucune preuve.» Le septuagénaire à la belle chevelure grise, fils d'un cheminot de Leeds, n'est pourtant pas précisément de la famille politique du «president Jack». Mais peu lui chaut, il en a fini de longue date avec les histoires de partis. «Par chance», explique-t-il : au milieu des années 70, il siégeait dans les rangs travaillistes à la municipalité de Cambridge, le Labour le voyait député, et puis, «coup de dé s!». Le 25 juillet 1978, Louise est née. «J'ai dû choisir entre la politique et la science. Je n'ai pas hésité une seconde.»
Louise Joy Brown. Le premier «bébé-éprouvette», le premier enfant conçu hors les entrailles d'une femme. Le fruit de dix ans de travail acharné, mené avec feu le gynécologue Patrick Steptoe dont Edwards cite à tout instant le prénom, avec la culpabilité de l'ami survivant. Avec lui, avec Louise, Bob le biologiste est entré au Panthéon de la médecine comme «le pionnier de la fécondation in vitro», la FIV. «Louise ? Elle va très bien, sourit-il derrière ses grandes lunettes carrées. Elle m'envoie une petite carte à chacun de ses anniversaires. Elle fêtera ses 25 ans cet été. J'ai aussi des nouvelles de sa