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Portrait

Claude Sarraute, demain la vieille

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A l’occasion du décès, ce 20 juin, de la romancière et chroniqueuse, icône du troisième âge des plateaux télé, nous republions ce portrait-dialogue paru en 2003 dans les pages de «Libération».
Claude Sarraute en juin 2001, sur la plage de Cabourg. (Medhi Fedouach/AFP)
publié le 2 juin 2003 à 23h15
(mis à jour le 20 juin 2023 à 10h47)

«Claude chérie, dis-le maintenant, c’est Raffarin qui t’envoie ? ­

— Qui ça ? ­

— Raffarin Jean-Pierre, t’en as parlé l’autre jour à France 2, mais tu t’es vautrée sur le prénom. Il est Premier ministre.

­— Et pourquoi je m’enverrais avec lui, s’il te plaît ?

­— C’est lui qui t’envoie, fais pas ton idiote. C’est clair, quoi. En pleines manifs sur les retraites, on ne voit que toi, tes escarpins Chanel et tes cheveux blanc platine. Tu as 75 ans. Vingt-cinq de plus que la mémère de moins de 50 ans, le fameux âge canonique des consommatrices. Explique-moi ce qu’une nana comme toi fait à la télé, sauf injonction du gouvernement ?

­— Je lutte contre le jeunisme et le racisme antivieux, mon lapin. On t’y verra, à mon âge, causer avec Steevy du Loft et rigoler quand Ruquier t’appellera «la septième vieille mère du monde»... Ça s’appelle faire de la résistance.

­— Raffarin aussi, dans son genre. Tu roules pour lui. T’es la femme-tronc de l’UMP.

­— L’UMquoi ? Des p’tits vieux, y en a plein la télé. Dan Rather, Larry King, Barbara Walters (1) ont tous 70 pinceaux.

— De quoi tu nous causes ? On n’est pas aux States. Ici, les vieux cathodiques, c’est Leymergie, PPDA, Claire Chazal, entre vingt et trente ans de moins que toi... Dans dix ans, il n’y aura plus personne.

­— C’est ça que vous voulez, vous faire lifter les vieux ? Y a du boulot. Parce que des vieux, y en aura de plus en plus. Et de plus en plus vieux.

­— Cool, je croyais que t’avais de l’humour. Quand t’étais jeune, t’éta

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