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Libération
Portrait

Jamais deux sans toi

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Fiona Shaw et Deborah Warner, 45 et 44 ans, actrice et metteur en scène. Icônes du «Powerbook», sur scène à Chaillot.
publié le 27 septembre 2003 à 1h08
(mis à jour le 27 septembre 2003 à 1h08)

L'une est blonde, l'autre brune. L'une, anglaise, l'autre, irlandaise. Voilà quinze ans que celle-ci met en scène celle-là. Et même s'il leur arrive souvent de travailler l'une sans l'autre, elles forment la paire la plus radioactive du théâtre britannique. C'est lors d'un mémorable Electre où celle-ci, Deborah Warner, avait conduit celle-là, Fiona Shaw, que le public français en 1992 découvrit l'insoupçonné en cette tragédie de Sophocle : la douleur, la soif de vengeance, la haine, et aussi une fragilité de grande brûlée intouchable, une violence de terroriste n'ayant plus rien à perdre. Dos nu, vague tunique noire échancrée sur des genoux tuméfiés, Fiona Shaw reprenait ce rôle après l'avoir créé quatre ans plus tôt à la Royal Shake speare Company. Jusque-là, dans ce saint des saints, elle n'avait été employée que pour des comédies : dès la première répétition avec Deborah Warner, elle sut que rien dans son jeu ne serait plus jamais pareil, elle apporterait sur le plateau l'entièreté d'elle-même et de ses émotions. «Pas besoin d'avoir nécessairement tout souffert dans la vie, dit-elle, l'imagination suffit à ouvrir des abîmes.»

Longue silhouette en jean et pull rayé, visage pâle, très dessiné et comme lavé, Fiona Shaw parle vite, sourit beaucoup, regarde intensément ses interlocuteurs. A ses côtés, Deborah Warner dit d'elle, d'emblée, qu'elle est la personne qui la fait le plus rire. D'ailleurs toutes deux rient, là, à grimper une fois de plus les monumentaux escaliers du th