Rawalpindi. Prison centrale. Cellule des condamnés à mort. Un professeur pakistanais en médecine homéopathique y attend la mort. Pour «une remarque innocente sur les origines de l'islam» faite, devant ses élèves, dans un collège d'Islamabad, il a été dénoncé et accusé de sacrilège. Puis, comme l'exige la loi pakistanaise sur le blasphème, condamné à la peine capitale. Depuis, le docteur Mohammed Younos Cheikh attend sa pendaison. Du fond de sa geôle, il a fait parvenir un message à Mariane Pearl dès qu'il a appris l'assassinat de son mari, Daniel. Pas une plainte, pas un mot pour déplorer sa propre condition, celle d'un mort en sursis, mais une longue phrase, touchante de maladresse, pour témoigner à la jeune femme sa sympathie et sa tristesse.
L'extrême cruauté peut conduire à l'extrême humanité. Même attitude chez Mariane Pearl que chez le condamné à mort pakistanais. Pas de rage devant l'accablante victoire du fanatisme et du terrorisme religieux. Pas de haine. Pas d'injures à l'encontre des bourreaux de son mari, des hommes qui l'ont égorgé comme un mouton devant une caméra vidéo, puis découpé en morceaux. Pas même un simple «les salauds». «Bien sûr que j'ai de la colère et que j'ai traversé toute la gamme des réactions mais, chaque jour, je me bats pour que mes sentiments soient supérieurs à mes réactions. Je me bats en permanence pour ça», précise-t-elle. «Devant la barbarie, je n'ai rien perdu des valeurs que nous avions en commun avec Daniel. Je n'ai à revenir sur auc