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Libération
Portrait

David Lynch, rencontre d’un 2e type

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A 57 ans, le virtuose américain du malaise se révèle apôtre du Maharishi Mahesh Yogi, qui prêche la paix par l’harmonie infinie.
David Lynch en décembre 2003 à Washington. (Jérôme de Perlinghi)
publié le 16 décembre 2003 à 2h21
(mis à jour le 16 janvier 2025 à 22h54)

Il pleut sur North Bethesda, Maryland. L’auto glisse sur Rockeville Pike, tourne à gauche. Arrive à 5504 Edson Lane, se gare au pied d’une grosse maison surmontée de clochetons asiatiques, le Maharishi Peace Palace. C’est ici que David Lynch doit participer au lancement d’une «Fondation pour la paix mondiale». Pas surprenant, se dit-on (se trompe-t-on) : Lynch, c’est Hollywood, et Hollywood, c’est la croisade antiguerre. On entre.

La salle où se tient la conférence de presse est pleine à craquer, pourtant quelque chose cloche : ces gens n’ont pas des têtes, des vêtements, de journalistes. Des devises sibyllines, encadrées de fleurs, ornent les murs : «Un état pleinement vivace de conscience est la base d’un management efficace.»

Sur la scène se trouvent un promoteur immobilier au regard trouble, un chef d’entreprise débonnaire, et Lynch, yeux bleus tombants, qui sourit comme un curé. Ils expliquent leur projet : lever un milliard de dollars dans le but de construire une «Université de la paix», en Floride ou en Californie. Il s’agit, disent-ils, de faire méditer collectivement 8 000 étudiants. Parce que la méditation collective ­ oui, c’est scientifiquement prouvé ­ a un impact sur l’environnement : elle fait baisser le taux de crime et de stress. Une telle université enverra suffisamment de bonnes vibrations pour couvrir la planète et assurer un monde meilleur. La paix mondiale pour seulement un milliard : une bonne affaire.

Apparaît sur un écran, prétendument live, depuis l’I