Il s'avance, en aube blanche, calotte pourpre, dans la fraîcheur du salon orientalisant du monastère d'Abou Gosh. Un rien hésitant. Pourquoi cet intérêt pour ma personne, semble-t-il se dire... On est certes là pour lui, et pour le «symbole» qu'il représente. Né juif à Oran, le voici désormais évêque auxiliaire du patriarche latin, Mgr Michel Sabbah, pour la communauté des quelques centaines de catholiques d'Israël parlant l'hébreu. Nomination voulue par Jean-Paul II, qui fait grincer quelques dents dans la mosaïque chrétienne compliquée de la région.
La cérémonie de son intronisation, il y a quelques semaines, s'est déroulée dans l'église d'Abou Gosh, dans un grand concours de frères, de nonnes, de dignitaires, de sympathisants et de curieux, venus écouter la messe chantée en hébreu. Comme une sorte de retour à ce que pût être l'Eglise de Jérusalem aux commencements du christianisme. «Enfin, nous sommes revenus à la maison», lançait le nouvel évêque en fin de cérémonie, propos qui a suscité aussitôt un flot de commentaires. «Oui, revenir en Israël, la maison. Je crois que c'est juste, par intuition. Et, au plan ecclésial, le christianisme hébraïque revient chez lui.»
Gourion, son nom est Gourion. Il ne l'a pas hébraïsé. «Lionceau», en hébreu, «moineau», en espagnol. Il est né à Oran, dans un milieu juif incroyant : «Mon père ne voulait pas que je fasse ma bar-mitsva...» Mais une grand-mère maternelle pieuse célébrait les fêtes. «Dans ma famille bourgeoise, du côté de mon père