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Libération
Portrait

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publié le 2 juin 2005 à 2h26

En vélo aussi, il existe des générations perdues. Philippe Gaumont est de ces trentenaires qui gravitaient autour de la planète Festina, de ces irrécupérables du dopage, qui l'ont toujours connu, toujours pratiqué et qui n'ont fini par s'interroger que quand la justice a enfin suppléé au laxisme des autorités sportives.

Pour Philippe Gaumont, dès ses débuts, c'était une pratique aussi obligée et aussi peu problématique que de se raser les mollets. Donc, il prenait de la cortisone pour supporter la douleur, de l'EPO pour développer les capacités respiratoires, des hormones de croissance et toute la pharmacopée la plus récente pour ne pas être distancé dans la course à l'armement chimique.

Les soigneurs trimballaient les fioles et faisaient les injections. Les médecins accompagnaient le mouvement avec plus ou moins d'hypocrisie. Les directeurs sportifs réclamaient des résultats pour complaire aux sponsors et aux organisateurs d'événements. Avant 1998, ces décideurs exigeaient de chacun qu'il «fasse le métier», qu'il «allume la chaudière», qu'il «sale la soupe». Puis, après le trauma Festina, tout cela se goupille en douce, sanctionnant à la Tartuffe ceux qui se faisaient prendre. Constat de Gaumont : «Le problème du vélo, c'est qu'on est dirigé par d'anciens dopés.» Beau mec fragile et un peu barré, Gaumont doublait cette posologie sportive d'une addiction récréative. Cocaïne, amphétamines, héroïne, pour faire la fête, se tenir éveillé en voiture, ou même, parfois, pour partir à