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Portrait

Franc-tirailleur

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Eric Deroo, 54 ans, collecte et publie depuis vingt-cinq ans documents et témoignages sur la mémoire des soldats des anciennes colonies, sans victimisation ni nostalgie.
publié le 4 novembre 2006 à 23h57
(mis à jour le 4 novembre 2006 à 23h57)

L'air du temps a rattrapé Eric Deroo. Il y a eu l'amendement sur le rôle positif de la colonisation, la sortie du film Indigènes de Rachid Bouchareb, ses cinq acteurs récompensés à Cannes. Lui, ça fait vingt-cinq ans qu'il connaît la chanson, traque photos, lettres et dessins. Qu'il entre chez les gens, moissonne la vie des familles. Sa passion pour les indigènes, il l'a cueillie en 1980 un jour de tournage dans les Ardennes. Un paysan lui a dit : «Des Nègres... il y en avait plein les arbres, dans la forêt d'à côté.» Depuis, ses rayonnages sont pleins de l'histoire des colonies, de soldats oubliés. Il a tourné un film sur les tirailleurs sénégalais, écrit un livre sur les Linh-tap, ces militaires indochinois au service de la France. Chez lui, on peut rester des heures à feuilleter les albums. Dans celui-ci, il y a de magnifiques filles noires aux seins nus, et, la page d'à côté, une famille de colons qui prend le frais sur un balcon.

«C'est le plus gros collectionneur d'images sur l'armée coloniale», affirme cette historienne. Il anime des conférences. Il est incontournable, sans cesse «dérangé» sur la question. Eric Deroo est un drôle de touche-à-tout. Son profil : pas vraiment gauchiste ni anticolonialiste. Difficile de savoir où il se situe tant il manie le paradoxe. «C'est une aberration de vouloir le comprendre», dit un de ses collègues. Deroo a banni le mot «réparation» de son vocabulaire. Il abhorre le discours victimisant.

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