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Libération
Portrait

L. A. sentimental

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James Ellroy, 58 ans, écrivain. Devenu le Dante de l'Amérique d'aujourd'hui, le maître
publié le 7 novembre 2006 à 23h59
(mis à jour le 7 novembre 2006 à 23h59)

Peut-être était-ce un bon jour ? En tout cas, James Ellroy souriait. Il avait bien dormi. Son dernier cauchemar remontait à une huitaine de jours. «J'étais de retour à Los Angeles, j'étais perdu, je marchais dans la rue, je n'avais pas d'endroit où vivre.» Il rêvait très peu de toute façon : «Parce que j'ai une vie imaginaire très active.» Il souriait. Il faisait beau, le vent soufflait sur Deauville et son festival du film américain. C'est depuis les palaces et les tournées de promotion qu'il voyait le reste du monde. Ça lui suffisait. Ce jour-là, il escortait le «Dahlia noir», Betty Short, femme trop libre des samedis soirs, retrouvée coupée en deux à la fin des années 40. Ce fait divers était devenu un livre. Il l'avait vendu pour 350 000 dollars au cinéma. Ainsi, à Betty, qui se rêvait actrice, il avait offert pour linceul une pellicule hollywoodienne. On pouvait lire dans le dossier du film : «Ma vie est inextricablement liée à deux femmes assassinées dont l'une était ma mère et l'autre Betty. Onze ans séparent leurs disparitions. Ces femmes constituent le mythe central de ma vie.»

Il souriait, donc. Il ne feignait pas la légèreté. Restait fidèle à ses obsessions. Cet homme-là ne mentait pas, il répondait toujours brièvement et mécaniquement aux questions, il les connaissait toutes. Il était enfermé dans la peau d'un gosse de divorcés qui, en rentrant d'un week-end chez son père, apprit que sa mère était morte après avoir été violée. Mère dont

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