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publié le 2 janvier 2007 à 5h15

C'était début novembre. Un record, sept petits jours, ronds comme une semaine, pour aller de Saint-Malo à Pointe-à-Pitre. Un fameux trois coques, Gitana 11, vent portant et loin devant. Et puis celui dont on ne connaissait ni le nom ni la réputation, à moins d'être un habitué des pontons. Là, ça fait quinze ans qu'on l'appelle «le bon choix», Lionel Lemonchois. Parfois il caresse son ventre rond, façon merci petit Jésus. Il est heureux. Il était un mercenaire qui offrait la force de ses bras sur le bateau des autres, quand la chance, le vent, ainsi qu'un armateur, un Benjamin de chez les Rothschild mais joliment délavé à l'eau salée, ont choisi de s'agripper à son talent.

L'instant d'une victoire solitaire était sûrement écrit dans ses rêves, mais pas dans ses obsessions. Chez lui, l'acharné et l'homme tranquille semblent faire les trois-huit. Aucun journal de bord ne tient les comptes de ses humeurs. Il n'y a plus de journal de bord. Là aussi, la machine a remplacé l'homme. Elle enregistre le vent, la position, la vitesse. Et ne dit rien des palpitations du capitaine. Lui non plus, d'ailleurs. Il est marin avant d'être sportif. Homme coquillage où l'on entend la mer, où l'on voit, creusée par le sel et le soleil, l'empreinte des joies et des tracas passés. En pleine course, il ne répondait pas à tous les appels. On ne va pas danser sur l'océan pour causer tous les quarts d'heure. «Pas envie de parler, pas envie de raconter ma vie.» L'ex-équipier resté dans l'om

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