Le grand chanteur folk américain Woody Guthrie avait écrit sur sa guitare: «This machine kills fascists» («Cette machine tue les fascistes»). Il n'a jamais quitté la veine des protest songs, rejoint dans les années 60 par Joan Baez, Dylan et d'autres. Dominique Grange est de cette race-là. Sauf qu'elle est française, qu'elle a commencé à chanter dans les cabarets de la rive gauche et que c'est Guy Béart qui lui a signé son premier vrai contrat de disque. en avril 1968.
Un mois plus tard, invités d'une émission sur RTL, les deux amis entendent les flashes qui interrompent Philippe Bouvard pour faire entendre les échos des batailles du Quartier latin. Elle n'est plus étudiante, mais se sent concernée. Bousculée. Elle entend Leny Escudero qui appelle les chanteurs à la grève et à aller sur le terrain. A Bobino, elle retrouve les «artistes en lutte».«Avec d'autres, je suis allée chanter devant Renault Billancourt, pour les ouvriers en grève. Je leur ai parlé. Je n'en suis jamais revenue.»Tout est dit. Elle se laisse emporter par le flot de Mai et vogue encore dans cette éternelle galère-là.
La rencontrer en cette année de commémoration des «événements» est rafraîchissant. Beaucoup de ses amis d'alors ont rejoint les cabinets ministériels, les partis, les maisons d'édition, les institutions (ou la droite nationaliste) et jettent un regard nostalgique et amusé sur leur jeunesse folle. Pas elle. Dominique Grange avertit : «Les conflits sociaux, l'injust