Avant qu’on ne le retrouve chez lui, Adrián Simancas Jaimes avait décliné la proposition de la photographe de retourner poser sur les bords du détroit de Magellan. Il n’a pas que ça à faire. A la fin de sa journée de technicien informatique dans un collège où il gagne l’équivalent de 750 euros par mois, il donne des interviews par téléphone à des médias du monde entier après qu’il a été avalé, puis recraché avec son kayak par une baleine à bosse. Dix secondes d’éclat instagrammable captées presque incidemment par la caméra de son père, fixée à un autre packraft, ce bateau gonflable qui tient dans un sac à dos. Le duo s’était embarqué le temps d’un week-end pour célébrer l’anniversaire du géniteur dans ce bras de mer qui raccorde le Pacifique à l’Atlantique. Ils n’y arriveront jamais.
Le jeune Vénézuélien a donné rencard dans la maison qu’il occupe avec son paternel à Punta Arenas, tout au sud du Chili, splendeur australe aux places géométriques et aux édifices pigmentés qui évoque par instants la Savannah de l’Etat américain de la Georgie, immortalisée dans Minuit dans le jardin du bien et du mal, le film d’Eastwood. «Du coin de l’œil, j’ai aperçu une masse bleu foncé et blanche qui se déplaçait rapidement. J’ai senti un coup dans le dos, comme une vague incroyablement puissante, qui soulevait le kayak et m’emportait. Une chose visqueuse, sans doute les poils des fanons, m’a effleuré le visage. J’ai fermé les yeux, je m’attendais à avoir mal. Allongé c