La colère est venue des champs. La détresse du milieu paysan, d’habitude idéalisée dans les cahiers d’écoliers façon images d’Epinal ou maltraitée à la télévision par une émission de speed-dating tapageuse et malaisante, a défilé sur les écrans pendant trois semaines. Antoine Thibault n’en a pas manqué une miette. Lui qui alerte depuis des lustres sur le mal-être de la profession n’a pas hésité «une seconde» à s’engager dans la bataille. Un jour sur un barrage autoroutier de Mantes-la-Jolie (Yvelines), un autre à bazarder du fumier devant la préfecture d’Evreux (Eure). Il reconnaît avoir été surpris par «l’ampleur» de la mobilisation. «Ça a pris partout, dans toutes les productions et toutes les régions», mesure-t-il, «admiratif de la motivation» de ses collègues. Bien sûr, il aurait aimé faire plus. Mais au-delà des cernes qui commencent à naître sous ses yeux, la traite des vaches n’attend pas. «Contrairement aux céréaliers qui sont en période creuse, nous sommes au travail tous les jours. Je ne pouvais pas laisser la ferme aux mains de ma salariée». Il reçoit sur son exploitation de Cintray (Eure), commune de 500 âmes.
Tout le prédestinait à devenir paysan. A-t-il seulement songé faire autre chose ? Il jure que oui. Les envies d’ailleurs n’ont pas duré. Ses plus beaux souvenirs, qui lui