Quand on voit sa frêle silhouette arriver en s’efforçant de se faire la plus discrète possible, ses petits yeux noirs jetant des regards inquiets autour d’elle, on mesure tout le courage qu’il lui a fallu pour s’avancer à la barre de la solennelle cour d’assises de Paris. Pour s’y faire porte-voix de l’éclatante violence subie par les prostituées transgenres et sans papiers du bois de Boulogne, elle qui a toujours vécu dans l’ombre depuis son arrivée en France il y a douze ans. De son Pérou natal, Cristina T. imaginait le «Paris des films», la «ville lumière» où «on tombe amoureux». Dans son Paris à elle, l’obscurité de l’allée de la Reine-Marguerite a remplacé la lumière et les agressions ont chassé la romance.
«Ce n’est pas vous qui êtes jugée mais bien l’homme dans le box», lui a répété l’avocat général lors du procès de son violeur, condamné à huit ans de prison, en mars. Il n’empêche : face aux jurés et à la multitude de robes noires, la presque quadragénaire confie avoir eu honte. Trop habituée à essuyer des regards accusateurs, des insultes, des jets de cailloux. Quand ce n’est pas une bouteille de champagne, balancée par la fenêtre d’une voiture, qui lui a lacéré le mollet sur vingt centimètres. Ou des tirs de billes de paintball en métal.
Elle s’ét