Nous ne verrons pas le lieu de vie d’Emilie Frèche, dont les romans sont pourtant nourris d’intimité, ou, pour reprendre ses propres mots, «à la croisée de la politique et de l’intime.» Elle n’a pas choisi, pour notre rendez-vous, un endroit qui lui ressemble, mais le restaurant vide, à cette heure-là, du cinéma l’Entrepôt, dans le XIVe arrondissement de Paris. Elle habite à côté. Tout au long de l’entretien, agréable au demeurant, la romancière reste sur ses gardes. Elle vient de réaliser son premier long métrage, très bien interprété par Benjamin Lavernhe, Julia Piaton et Catherine Hiegel.
Comme son titre l’indique, c’est un film engagé : à Briançon, un homme prend en charge un migrant mineur qu’il vient de heurter en voiture et que la police des frontières recherche pour l’expulser. Jusque-là plutôt indifférent au sort des migrants, il cache l’étranger et petit à petit défend la cause des exilés, quitte à avoir maille à partir avec la justice. Dans le dossier de presse il est écrit qu’Emilie Frèche a «l’intention de faire évoluer les conditions d’accueil des enfants réfugiés».
Gageons qu’avec les Engagés, œuvre réussie mais consensuelle, la réalisatrice ne récoltera pas les ennuis causés par son dernier roman, Vivre ensemble. Publié en 2018, autobiographique bien qu’écrit à la troisième personne, il racontait la coexistence difficile entre une femme (c’est-à-dire Emilie Frèche) et le fils de son compagnon. Quelques semaines avant la parution, il