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Libération
Le portrait

Hélène Grimaud, accordée à elle-même

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La pianiste prolifique lutte pour la sauvegarde des chevaux mustangs, après celle des loups.
Hélène Grimaud à Paris, le 26 octobre 2023. (Romy Alizée/Libération)
publié le 20 décembre 2023 à 14h52

Pailletée de pied en cap, blazer, pantalon, boots, Hélène Grimaud fait une entrée étincelante dans le luxueux écrin du théâtre des Champs-Elysées. Roulement de cymbales, l’Orchestre philharmonique de Londres entame le Concerto pour piano n° 1 de Brahms. Tempête et vents violents, cors, violons, violoncelles, contrebasses, flûtes, hautbois, clarinettes, basson déferlent. De profil, à l’abri d’un brouillard de cheveux, la pianiste semble aux aguets, mains sur les cuisses devant le clavier du Steinway ouvert comme un grand coquillage bivalve. Les paillettes noires du blazer palpitent, on ne perd rien pour attendre. 2 000 personnes retiennent leur souffle et leur toux, et les violonistes leur archet, lorsque deux bestioles de chair pâle papillonnent au-dessus du clavier, si vives qu’à peine elles effleurent les touches d’ivoire. Brahms, l’ami d’enfance d’Hélène Grimaud, «qui m’est nécessaire pour vivre». Les artistes sont «des athlètes des petits muscles» : on comprend ce qu’elle a voulu dire en regardant ses phalanges grésiller au-dessus du clavier. Tout feu tout flamme, le tailleur à paillettes pris de lyrisme chavire et tangue sur le tabouret, l’étoffe fait des étincelles, emportée avec une énergie fraîche et pure dans la passion lyrique. C’est aussi émouvant que la rencontre fugace le long d’une route avec une bête sauvage, un lièvre, un cerf. Parfois la pianiste renverse la tête en arrière, ses lèvres murmurent. A qui parle-t-elle en secret ? Une romanc

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