Le jour, ou plutôt la nuit, de ses 63 ans, il est entré dans Gaza. A pied, à la lueur des jeeps de Tsahal, le long d’un trait de goudron sur une purée de gravats, comme un ruban couronnant l’œuvre consciencieuse d’annihilation. Tout autour, le noir et les fantômes qui l’habitent, dans le crépitement des talkies-walkies et le cahotement incongru de sa valise à roulettes. Mais Filiu, discipliné, regarde droit devant, dans les pas du cortège de Médecins sans frontières (MSF) qu’il a réussi à intégrer en ce 19 décembre, faisant de lui le premier chercheur à pénétrer dans l’enclave interdite aux journalistes, à l’exception de ceux prêts à s’y rendre depuis l’intérieur d’un tank israélien.
On en connaît, parmi ceux qu’on appelle les «gilets à poches», qui en auraient fait des caisses, façon astronautes de l’horreur. Mais l’historien – qui goûte peu l’expression «paysage lunaire» pour parler d’une destruct