Des sirènes. Les hélicos au-dessus de Paris. Des bruits déchirant l’atmosphère cotonneuse de ce mois de janvier froid et sec. Et puis le silence. Le bout des doigts engourdis. L’absence de salive. Un sentiment de vulnérabilité qui lui fait dire «j’ai peur». Depuis le 7 janvier 2015, le bruit, le silence et la fureur rythment la vie de Joachim Roncin. A 47 ans, le directeur artistique se souvient de chaque seconde de cette journée et de celles d’après. Sidéré par la violence de l’attentat au sein de la rédaction de Charlie Hebdo, il poste sur Twitter dans les minutes qui suivent : «Je suis Charlie». Trois mots en lettres blanches sur un carré noir. Un slogan qui le propulse dans un voyage en absurdie qu’il narre avec humour dans son livre Une histoire folle. Il sourit enfin, mais la tempête médiatique dans laquelle il fut pris, les récupérations politiques de part et d’autre, les menaces aussi, l’ont abîmé, fracassé. Il n’a pas compris pourquoi en un instant ses mots devenaient les nôtres, pourquoi sa parole était attendue sur tous les sujets. Encore aujourd’hui, des journalistes l’appellent pour lui demander son avis sur le conflit israélo-palestinien. Lui qui n’a jamais voulu faire de «Je suis Charlie» un quelconque étendard revendique le droit de ne pas prendre position. De se taire. De préférer le silence au bruit
Le portrait
Joachim Roncin, le cœur en «Charlie»
Article réservé aux abonnés
Joachim Roncin, inventeur du slogan «Je suis Charlie». (Christophe Maout/Libération)
par Eva Roque
publié le 10 janvier 2024 à 17h36
Dans la même rubrique