Il y a des rencontres qui s’engagent mal puis qui finissent par devenir très intéressantes. Kaouther Adimi n’avait pas une folle envie d’un portrait personnel comme l’est la Der de Libé. On la sentait un peu poussée dans le dos. Elle n’est pas timide, elle est méfiante. Elle n’est pas réservée, elle est farouche. Ses amis s’en amusent : «Elle monte vite en pression. Elle prend feu et se braque. Elle n’a pas ce côté accommodant et charmeur qu’on pourrait lui supposer.»
Pour ce qui nous concerne, l’affaire aussi s’était mal engagée. Ça avait traîné, on avait hésité et on s’y était résolu un peu par hasard. Si Kaouther Adimi n’avait été qu’une écrivaine de talent publiant son sixième roman, on aurait laissé la main aux critiques littéraires maison. Mais cette fois, il s’agit plutôt du récit de ses allers-retours entre France et Algérie, au cœur de la décennie noire, alors qu’elle n’est qu’une enfant. Mais aussi de son rapport à ces langues opposées, à ces cultures percutées, à ces avenirs dissociés. Et là ça devient stimulant.
Et voilà pourquoi l’on se retrouve place de la Bastille, au Café français, nom prédestiné vu les sujets à aborder. Histoire de s’apprivoiser et de s’en amuser, on convient tous deux que la non-envie de ce tête-à-tête parisien est réciproque. D’autant qu’assez vite, elle lance : «Mon père m’a toujours dit qu’il fallait éviter de parler de religion, d’argent et de politique». Evidemment, il sera question de ces trois thématiques. Et aussi