Libération a demandé à des autrices et auteurs d’aller à la rencontre d’un de leurs personnages emblématiques pour en dresser le portrait imaginaire.
Toulouse le matin, c’est comme un cassoulet sans saucisse. Il y manque les étudiants beurrés qui vomissent sur les trottoirs, les dealers qui dealent, les punks à chiens qui aboient, l’alcool, la pisse et le sang qui coulent généreusement dans les caniveaux, la musique qui gicle au coin des rues. Il y manque cet embrassement violent des nuits toulousaines, où la ville vous étreint dans sa fureur et dans sa folie, où tout – surtout le pire – peut advenir.
Seulement voilà, Martin Servaz, commandant au SRPJ de Toulouse, légende vivante de la police locale et personnage fétiche, est un lève-tôt. En avant donc pour le rituel du petit noir en terrasse, à la fraîche, du côté des Carmes, où les commerces de bouche lèvent à peine leur rideau.
Servaz a 52 ans. Il pourrait indifféremment être un acteur, un prêtre défroqué, un gentleman anglais façon Colin Firth, un psy blasé. Il ressemble à tout, en somme, sauf à un flic. L’homme est réservé, sans âge, plutôt beau, fatigué. «Il avait l’air de sortir du tambour d’une machine à laver», ai-je écrit dans Glacé, le premier tome de ses enquêtes, alors que notre gaillard n’avait que 40 ans. C’est assez injuste : du spleen plein les yeux, une voix sans pathos, il d