«Est-ce que tu crois que ça fait mal de mourir ?» Elle a 7 ans, et attend une réponse de la part de sa cousine plus âgée, qui choisit de comparer la mort au sommeil. Léa Moukanas est soulagée. Plus besoin d’avoir peur dans la voiture roulant entre Beyrouth et Damas, en pleine nuit. Elle n’a pourtant rien oublié des chars imposants, du bruit des bombardements, de la vision des cadavres le long de la route. Mais Léa, elle, n’a pas peur. Joumana Moukanas relate ce jour d’été 2006 avec les mêmes mots que sa fille : «J’étais effrayée, seule avec mes deux premiers enfants, enceinte du troisième. Je n’ai pas quitté le regard de Léa de tout le trajet. Il y avait une force incroyable dans ses yeux.»
Léa Moukanas a 25 ans aujourd’hui. La jeune diplômée de Sciences-Po Paris reprend le récit de sa vie sans aucun pathos. Elle déteste ça. Ne jamais se plaindre. Avancer. Agir. Aider. Avec des éclats de rire gorgés de soleil, et une vitesse d’élocution filant parfois le tournis, elle embarque son interlocuteur dans son univers où la mort s’est taillé une place de choix. L’une de ses camarades de classe décède à l’âge de 13 ans. Deux ans plus tard, sa grand-mère maternelle Aïda meurt à l’âge de 60 ans d’une leucémie foudroyante. Dans les couloirs de l’hôpital, Léa Moukanas croise un jeune patient. A peine plus âgé qu’elle, il est dans le même service que son aïeule. Elle prend conscience que les 15-25 ans n’ont pas de service dédié, et que les problématiques liées à leur âge ne