C’est lui qui a contacté Libération. Un mail bien écrit, adressé au journal en général, à personne en particulier. Il voulait parler de ses camarades enlevés par l’armée guinéenne, un an plus tôt. On l’a appelé et on a compris qu’on voulait surtout parler de lui. Il a dit oui. Deux jours plus tard, on descendait du train à Clermont-Ferrand. Il nous attendait devant la gare, rue de l’Union-Soviétique. «Je porte un pantalon jean, une chemise blanche à rayures noires, une casquette bleu marine et un sac à dos noir», avait-il écrit. C’était vrai.
Mamadou Bhoye Diallo a 39 ans. Il a demandé l’asile à Clermont-Ferrand «par hasard». Il n’avait jamais entendu le nom de la ville avant d’y débarquer, le 27 mai. En été, les volcans d’Auvergne, tout autour, lui rappellent les reliefs des collines du Fouta, la région de ses parents. Lui est né et a grandi à Conakry. Son père, Thierno Ousmane Diallo, était un commerçant, qui importait clandestinement ses produits depuis la Sierra Leone voisine, un crime capitaliste puni sévèrement dans la Guinée socialiste de Sékou Touré.
Mama