La lumière baisse puis s’éteint, plongeant dans l’obscurité le buste du général Leclerc et la grande carte de l’Ukraine posée sur un chevalet. Avec l’habitude de celui qui veille tard dans le labyrinthe ultramoderne de Balard, à Paris, le chef d’état-major de l’armée de terre déplie sa silhouette longiligne, fait quelques pas pour déclencher le capteur, se rassoit pour reprendre le fil des confidences. L’exercice est inhabituel pour cet homme plutôt réservé, à l’humour discret, «qui ne dépense pas plus d’énergie qu’il n’en faut pour l’affichage extérieur», assure un de ses collègues.
Mais Pierre Schill vient de signer un plaidoyer pour le «commandement par intention», document de travail adapté au grand public. Il est persuadé que communiquer clairement l’objectif et le cadre des missions à ses subordonnés puis leur laisser toute liberté d’action, sans leur demander de comptes à chaque étape, est la clé de l’efficacité, et pas seulement sur un théâtre d’opérations. Un style de management respectueux, mais exigeant, qu’il applique au quotidien dans les couloirs du ministère, ce qui enthousiasme les uns et déroute les autres, peu habitués à une telle marge de manœuvre.
Né dans une garnison en Champagne, fils d’une prof de sciences physiques et d’un officier dans l’artillerie, Pierre Schill est l’aîné de six enfants, élevés «dans un cadre ferme mais serein, avec une vraie forme de liberté». «Enfant studieux à lunettes», puis adolescent «mal coordonn