Il est 7 h 30 quand Pinar Selek s’élance dans les rues de Nice, direction la plage. «La mer, il n’y a rien de plus important pour moi», dit-elle en souriant alors qu’elle retire sa robe, dévoilant son maillot rouge. Et la voilà qui court sur les galets, plongeant tête la première dans l’eau déjà chaude de la Réserve. «Elle est bonne, non ?» lance-t-elle au loin, d’une voix teintée par le tabac. Difficile de deviner que Pinar Selek, 51 ans, visage radieux, vient de recevoir une nouvelle qui pourrait briser sa vie. Depuis 24 ans, cette autrice turque, naturalisée française depuis 2017, enseignante-chercheuse à l’université Côte d’Azur (UCA), vit un enfer judiciaire. Arrêtée une première fois en raison de ses recherches sur les marginaux d’Istanbul, condamnée injustement pour une explosion sur un marché aux épices, elle a été acquittée quatre fois. Mais le 21 juin dernier, elle apprend par voie de presse que son dernier acquittement est annulé. Pinar Selek risque la prison à vie pour une explosion qui s’est avérée avoir été causée par… une fuite de gaz.
Quand on lui demande de nous donner les dates clés de sa vie, portrait de Libé oblige, elle refuse d’être réduite à cette saga. Ce sont d’autres moments qui surgissent, plus poétiques, plus étonnants. Comme sa rencontre, à 15 ans, avec les enfants des rues d’Istanbul : «Je suis all